Amplitude, position et puissance

velo conceptL’Amplitude du mouvement – Le Réglage de la position – La puissance de pédalage

Par John Howard
John Howard dont le nom est inscrit au panthéon du cyclisme US fut vainqueur de l’Ironman d’Hawaï en 1981 et remporta 14 titres de Champion des Etats-Unis. Il a participé à trois Olympiades a écrit quatre livres et produit une vidéo sur les techniques les plus performantes du cyclisme. Il dirige l’Académie des Champions Cyclistes.

Dans l’article  » La Souplesse d’abord  » Dr. Ernie Ferrel et moi-même, avec la contribution de Chris Maund du C.H.E.K Institute, avions présenté l’amplitude du mouvement comme étant un composant primordial de la performance cycliste.

En conclusion de l’article nous débattions sur l’utilisation du Spin Scan du CompuTrainer pour valider le fait que tout cycliste verra ses résultats augmenter d’une manière très nette en travaillant la souplesse.

Souplesse, Force et Position:

Dans cet article, nous expliquons en détail notre méthode d’analyse de la position, comment régler la position sur la bicyclette, et aussi nos priorités en ce qui concerne l’entraînement pour la force. Lorsque nous analysons la position d’un cycliste sur sa bicyclette, nous envisageons la position idéale pour une efficacité maximum, une plus grande puissance et aussi un plus grand confort et une meilleure sécurité. Un cycliste souple au niveau musculaire, avec un bon positionnement du bassin et doté de muscles adducteurs puissants, sera capable de s’allonger beaucoup plus et de développer plus de watts pendant plus longtemps que celui qui n’aura développé aucune de ces qualités. De deux cyclistes dotés de la même VO2 Max quel est celui qui ira le plus vite ?
Afin de recueillir des informations pertinentes nous demandons à notre cycliste d’atteindre son seuil anaérobie sur le Computrainer (Ergocycle). Monter l’effort jusqu’au seuil génère une fatigue musculaire modérée qui fait apparaitre les défauts biomécaniques et les conséquences d’une position inadéquate. En partant de nos observations nous corrigeons la position du cycliste au cas par cas.
Nous enregistrons les informations de base concernant la position du cycliste sur une feuille d’analyse. Nous enregistrons tous les paramètres de réglage existants avant de procéder à toute modification. Au fur et à mesure que nous modifions les paramètres de réglage, nous les notons avant de les tester sur le Computrainer . Avec les enregistrements de toutes les modifications, nous pouvons fournir à chaque client un graphique montrant précisément l’interférence de tous les réglages sur le pédalage. Etant donné, qu’en général les problèmes sont liés entre eux, Dr Ferrel et moi-même recherchons les plus évidents. Nous identifions les groupes musculaires qui  » se comportent mal « . On commence par les problèmes de réglage de cale par rapport au pied, nous nous assurons que la plateforme de pédalage est plate. Ceci implique de trouver la bonne inclinaison du pied sur la pédale ainsi qu’éventuellement la cambrure de la chaussure pour faire en sorte que l’ensemble muscle – squelette ait la plus grande efficacité de pédalage possible. Nous vérifions l’alignement des chevilles par rapport aux pieds. Si l’alignement n’est pas bon, nous ajoutons des intercalaires sous les cales jusqu’à ce que nous trouvions le bon alignement et donc le meilleur pédalage. Nous prenons note des plus infimes modifications pour de futures références.
Un des problèmes les plus évidents concerne l’écartement du genou. Quand les genoux sont écartés vers l’extérieur ( style cow-boy) la force de pédalage ne se fait pas suivant un axe linéaire. Ceci engendre une inefficacité biomécanique ainsi que le risque de blessure à répétition. L’écartement des genoux est en général causé par une tension des muscles rotateurs de la hanche (tensor fascia latae) (Voir l’article Souplesse). Dans certains cas, le réglage de la position est la cause du problème et la solution passe une modification de la longueur de la potence ou d’opter pour une tige de selle offrant un réglage de recul plus important.

Hauteur de selle et recul de selle:

La hauteur correcte dépend de l’amplitude de mouvement de chacun. Ceci est extrêmement important. Nous avons vu nombres de cyclistes et de triathlètes performants avec des hauteurs de selle très différentes, cependant Dr.Ferrel et moi-même sommes plutôt partisans d’une plus grande hauteur de selle que préconisée la plupart du temps, nous obtenons ainsi une légère augmentation de la flexion de la voûte plantaire (les orteils pointés vers le bas en fin de poussée). Ceci met en action le potentiel de plus petits muscles de la jambe, tels que le gastrocnemieus et le soleus dans le pédalage. Nous nous efforçons de la sorte d’utiliser au mieux tous les muscles pendant la durée du tour de pédale et ainsi d’optimiser la remontée de la pédale.
Nous étudions le cycliste en train de pédaler, afin de comparer l’extension de sa jambe gauche par rapport à la droite. Le Spin Scan sur le Computrainer nous aide à équilibrer les deux côtés, éliminant ainsi les petits pics de puissance qui dénote un coup de pédale  » gauche « , inefficace.

Nous mesurons le couple de puissance pour chaque côté, le pourcentage de watts développés et le résultat global de rendement. Nous utilisons un goniomètre pour mesurer l’extension réelle de la jambe dans la position 6h00. Nous centrons les aiguilles du milieu du goniomètre sur le tibia et le fémur. En position 6h00 les lignes doivent recouper en bas la cheville et en haut le grand trochanter. Assurez vous bien que le bassin n’est pas incliné et que le pied se trouve légèrement en avant, orteils pointant vers le bas. L’amplitude de mouvement de chaque individu, surtout la souplesse des tendons et le degré de flexion de la plante du pied détermine l’extension idéale de la jambe. En se basant sur l’amplitude de mouvement propre à chaque individu on cherchera à obtenir au niveau du genou, un angle d’environ 34 – 37 degrés quand la pédale se trouve au point mort bas. En vérifiant les deux jambes on recherchera une éventuelle différence de longueur de jambe. S’il y en a une, il faut tout d’abord voir si c’est d’ordre anatomique ou musculaire. Nous avons découvert que, dans de nombreux cas, ces différences de longueur disparaissaient après cet ajustement.
Ensuite nous nous concentrons sur le recul de selle. Le recul de selle se calcule en utilisant un fil à plomb. A la jonction de la rotule et du tendon du quadriceps se trouve notre point de repère. Si vous attrapez votre rotule avec votre main, jambe tendue, vous sentirez le point exact par où devra passer le fil à plomb. Vous ne pouvez pas vous tromper, en effet il y a une légère dentelure de chaque côté. Le fil doit passer par la base du gros orteil et l’axe de la pédale. Une erreur généralement faite par la plupart des entraîneurs est de se servir du devant de la rotule comme point de repère. De ceci découle une position trop reculée et bien entendu, une tension trop importante au niveau du genou , ce qui surtout pour les adeptes de l’ultra distance, est un gros problème. Le réglage du recul devra se faire en respectant le point de repère défini plus haut.
L’inclinaison de la selle est quelque chose de personnel qui devra se trouver à travers sa propre expérience. Si le bec de selle est trop bas, le cycliste aura tendance à glisser vers l’avant, et de ce fait mettra trop à contribution ses quadriceps. Trop haut, et le cycliste ne pourra pas atteindre l’arrondi optimal de son dos.

Haut du dos et positionnement sur la bicyclette :

Le haut du buste est souvent une zone à problème, en position basse de recherche aérodynamique. Notre but est d’équilibrer et de renforcer les muscles de cette zone comme les trapèzes et les muscles des épaules (rhomboïdes) afin d’améliorer la performance biomécanique et aérodynamique. Avec le Spin Scan, nous pouvons relever les modifications dans les courbes de couple et définir le moment où l’on gagne ou l’on perd de la puissance. Cette démarche bien que paraissant simple à première vue est en fait très complexe. Souvenons nous que chaque partie du corps est interconnectée avec une autre, de ce fait il faut impérativement prendre en compte ces interactions.

La relation entre les muscles du thorax et le cintre:

Le confort est fondamental dans le réglage de la position. Les cintres se font en différentes largeurs afin de s’adapter aux différentes morphologies. Bien trop souvent les cyclistes utilisent des cintres soit trop étroits soit trop larges. Une personne large d’épaule voudra un cintre plus large. Cependant nous recommandons pour chaque morphologie l’utilisation du cintre correspondant le plus étroit, afin de privilégier l’aérodynamisme sans léser la performance biomécanique. Le réglage du cintre devra se faire en position légèrement relevée avec la partie basse du cintre quasiment parallèle au sol (quelques degrés d’inclinaison suffisent). Les poignées de frein seront-elles aussi légèrement relevées par rapport à l’horizontale? Là encore on rencontre trop souvent des cyclistes avec des cocottes de frein trop hautes ou trop basses, ce qui, bien entendu, empêche un bon positionnement sur la bicyclette. En position trop basse, le cycliste doit étendre ses avants bras pour atteindre les cocottes et du même coup il doit relever la tête, en basculant le bassin en arrière et en bloquant les muscles thoraciques. Si les cocottes sont trop hautes, le corps se trouve trop redressé. Quand nous trouvons la bonne position des mains et du dos, les coudes s’aplatissent de façon naturelle, et la tête s’abaisse de quelques centimètres. Une fois les coudes pliés de manière correcte nous obtenons naturellement un bon arrondi du dos. Le bassin se retrouve en légère bascule avant plutôt qu’arrière comme nous l’avons vu plus haut. La bonne bascule du bassin est primordiale. Quand le postérieur se relève, le dos s’aplatit. Ce qui libère tous les groupes musculaires importants du thorax.
En cyclisme, on oublie trop souvent le rôle important des muscles du thorax. La plupart des coureurs focalisent leur entraînement sur les quadriceps les ischios et les fessiers. En travaillant de manière spécifique les abdominaux, les obliques et les lombaires, les cyclistes développeront leur puissance, tout en augmentant la durée d’utilisation de cette puissance. Nous insistons pour que dans les ascensions, nos coureurs gardent les coudes pliés afin d’aplatir le dos et de garder une position reculée sur la selle. Ce qui nous donne au final un pédalage plus puissant plus efficace. En renforçant les muscles annexes du thorax les cyclistes retardent le moment où ils commenceront à produire des lactates au niveau des muscles moteurs principaux. De ce réglage de position optimum découle une respiration plus efficace et la mise en route du système nerveux parasympathique.

La Bonne Respiration:

Souvent nous voyons un cycliste dans l’effort aspirer l’air avec force. Ces aspirations forcées activent le système nerveux parasympathique, entraînant une réaction de grand stress type  » tout ou rien « . A travers le travail commun que nous avons réalisé avec Ian Jackson auteur de  » Breathplay  » et créateur du CD  » Zooming « , nous avons appris qu’ en passant outre notre habitude d’aspirer l’air pour la remplacer par la technique de l’expiration forcée, nous obtenons un stimulus relaxant du système nerveux parasympathique. La technique de base d’expiration active Breathplay donne au coureur d’endurance plusieurs avantages importants. Elle permet d’améliorer l’endurance en augmentant la capacité cardio-pulmonaire , en renforçant le thorax et surtout en générant une profonde relaxation en parallèle avec une augmentation générale de la puissance. De plus, le système de respiration alternée sur un rythme impair qui est à la base de la technique Breathplay, fait en sorte que la jambe d’appui du coup de pédale varie à chaque expiration. Cette technique de respiration alternée permet un équilibre du travail des deux jambes. En 1984 Alexi Grewal devint champion Olympique à Los Angeles en utilisant la technique Breathplay. De nombreux coureurs pros et élites utilisent cette technique.
Après avoir changé les équipements nécessaires, nous allons examiner les différentes parties du corps qui ont besoin d’aide.

Une fois déterminés les problèmes de chacun nous mettons en œuvre des étirements spécifiques et ensuite nous attaquons le travail de renforcement. Certains exercices du cours  » Souplesse Niveau 1  » doivent être faits avant chaque séance de renforcement musculaire. En nous étirant, nous passons par une phase d’éveil des muscles du thorax et nous nous échauffons. On commence par une série d’exercices au sol. Après, nous passerons à la salle de gym puis à la bicyclette. Cette progression est extrêmement importante. Si on commence par le travail de renforcement avant d’avoir atteint une amplitude de mouvement suffisante, on atteindra pas le maximum de puissance permis.
Régler parfaitement un corps sur une bicyclette dans l’optique d’une compétition n’est pas une science exacte. Souvent, la position parfaite se dessine lentement sur une période de temps plus ou moins longue au fur et à mesure que la forme du cycliste s’améliore.
John HOWARD.

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